L’histoire de l’amicale débute dès 1903, grâce à l’existence d’une « Union Laïque des Anciens Elèves du Crêt de Roch ».
La loi de 1901 existe, mais nous sommes 2 ans avant la loi de 1905. Des membres de cette union (apparemment la majorité d’entre eux) sont à l’origine de la création de l’Amicale Laïque.
Elle a été fondée lors d’une assemblée tenue le 28 juillet 1923, et elle commence à vivre dans une salle de classe du groupe scolaire Saint-Barthélemy, lieu qu’elle partage avec d’autres associations de la ville.
Elle organise essentiellement des conférences culturelles et des projections cinématographiques. C’est en 1924 qu’elle confirmera son existence légale au travers d’une déclaration publiée au journal officiel du 29 mars 1924. Cette date est donc sa date de naissance « institutionnelle ».
Après quatre années d’efforts et de revendications pour obtenir un siège, l’association s’installe en 1928 dans un local situé rue Royet.
Ce local était, mais les informations sont floues, situé dans l’emprise du bâtiment actuel. L’inauguration des locaux a lieu en février 1928.
Dès lors, les militants et militantes « amicalistes » se consacrent au développement des activités : concerts, conférences, réunions de familles. Les sections se multiplient : chorales, « gerbe artistique », sections de gymnastiques, groupes boulistes, sarbacane. Ils organisent des bals et des fêtes familiales, mais aussi et surtout beaucoup de conférences.
En 1932, l’Amicale des Chappes, donc la partie de l’Union qui n’avait pas souhaité fonder l’Amicale en 1923, fusionne avec l’Amicale Laïque du Crêt de Roch. En mai 1936, la grande salle du patronage, qui est l’espace principal des activités, est interdite d’usage par les services municipaux pour raison de danger. Se pose alors le problème d’un bâtiment adapté.
En 1938, les démolisseurs interviennent. Le chantier de reconstruction se déroulera jusqu’en juillet 1939. Le 16 juillet, le président de l’époque prononce un discours d’inauguration qui se termine ainsi :
« Aujourd’hui, 16 juillet 1939, dans la joie de réaliser nos voeux les plus chers, nous vous assurons mesdames, messieurs, chers camarades, de notre désir de garder à cette maison son accueillante simplicité. Doté d’un patronage modèle, les laïques du quartier s’efforceront de faire pénétrer dans les familles ouvrières, avec la joie de vivre, l’assurance de la vertu laïque et républicaine.
Au-dessus des partis, ils proclament et démontrerons les bienfaits de la post-école et d’un enseignement que nous voulons toujours plus humain et plus rationnel. »
Le terme « Education Populaire » n’apparait pas dans les discours : la confiance dans l’Ecole Publique et les contenus de son enseignement est totale et le but de l’association est la défense de cette école, son développement, et la promotion des enfants du milieu populaire par le travail scolaire, la culture, le sport encadré par des militants sportifs (c’est le terme utilisé à cette époque). L’Ecole Publique est considérée comme l’outil privilégié de la promotion sociale.
L’idée d’un engagement « au-dessus » des partis fait plutôt référence à l’idée de « philosophie républicaine partagée » qui transcende les engagements partisans plutôt qu’à une défiance à l’égard de la politique. La suite prouvera que ce socle idéologique est moins solide que ne le pensaient les militants de l’époque.
En août, la deuxième guerre mondiale commence.
On a des traces des réunions du conseil d’administration jusqu’au 13 décembre 1941. Des activités ont fonctionnées jusqu’à cette date, des collectes d’argent sont effectuées pour aider des familles de prisonniers.
Puis on ne retrouve des comptes rendus d’activités et d’assemblées qu’à partir de septembre 1944. Pendant l’occupation, les locaux (notamment l’actuelle grande salle polyvalente du 2ème étage) sont utilisés par des services et des organisations pétainistes de collaboration, notamment la milice fasciste et antisémite. L’occupation du lieu a un caractère symbolique mais aussi stratégique : les militants communistes sont nombreux dans le quartier. Le dispositif de collaboration fait preuve d’efficacité et la Gestapo ne s’installe à Saint-Etienne qu’à la fin février 1943, au Nouvel Hôtel a Châteauroux.
De nombreux responsables de l’Amicale Laïque, devenus clandestins, sont engagés tôt et de manière très active dans la résistance locale. Résistants de la première heure, elles et ils vivent un véritable enfer : dénonciations, vie dans des cachettes souterraines. Le relief du quartier, les traboules, leurs permettrons souvent d’échapper à de nombreuses raffles. Leurs témoignages sont catégoriques : sans l’engagement de la milice locale, des collaborateurs locaux, leurs arrestations n’auraient pas été possibles.
Beaucoup paient le prix fort, notamment les communistes, voici quelques noms parmi beaucoup d’autre :
Marcel Berne est mort en déportation
Marcel Thibault a été déporté
Marcel Valensant a été déporté.
Johannes Saunier a été déporté
Beaucoup ont connu la torture, beaucoup d’autres (dont Eugène Perrichon, Auguste Crouzet) ont combattu dans les FTPF et les FFI. A cette époque, dans les terribles combats communs, se sont forgé des liens d’amitié très solides entre des membres de la Paroisse et des militants communistes de l’Amicale Laïque. Le journal Témoignage Chrétien, plus exactement les « cahiers du témoignage chrétien » sont imprimés dans les sous-sols de l’église de la nativité dont le curé, l’abbé Ploton est lui aussi un résistant de la première heure.
Fait moins glorieux, dans le même temps, un groupe, dans lequel ne figurait aucun responsable élu au CA ou militant sportif, a négocié avec les autorités de collaboration la réouverture de la buvette …
Les pétainistes et les forces de la collaboration avaient cloisonné les salles d’activité, notamment la grande salle pour en faire leur bureaux. A la libération, fait peu connu et peu étudié, ils ne partaient et ce sont les responsables survivants qui les ont les chassés. C’est un homme déterminé, Lucien Tatot qui a clos la période de cet usage sinistre en abattant les cloisons au moyen d’une masse.
Puis les activités sportives et culturelles reprennent. Les activités dominantes sont culturelles et sportives (notamment la gymnastique de salle très pratiquée à l’époque dans l’ensemble de la ville). On retrouve de nombreux comptes rendus faisant état de la confection de costumes de clowns, de costumes de théâtre, tenues de ballerines. On fait aussi du chant, de l’opéra. La gerbe artistique fonctionne avec un fort dynamisme. L’association est en fait un foyer d’éducation populaire et citoyenne. Les activités enfances sont très développées avec notamment le patronage entièrement encadré par des bénévoles.
Dans cette période, les instituteurs jouent un rôle important dans l’association. Ils bénéficient d’un grand prestige moral, d’une autorité naturelle. Ils sont en contact permanent avec les familles.
En 1962, les administrateurs décident de créer une salle de cinéma : le « Ciné Roc ». C’est la grande période des cinémas de quartier. La salle est équipée avec des sièges récupérés au cinéma le « Kursal» en cours de rénovation.
Ce cinéma, comme beaucoup d’autres cinémas associatifs de quartier, cessera son activité en 1971. C’était un cinéma très bon marché, qui organisait beaucoup de séances pour les enfants.
L’Amicale Laïque du Crêt de Roch décline, comme beaucoup d’autres.
Une nouvelle politique sociale nationale se met en place et les centres sociaux font leur apparition : les animateurs professionnels et les travailleurs sociaux remplacent les militants politiques. Peu de recherches et de réflexions ont été menées sur ce vaste processus qui a incontestablement modifié le rapport des milieux populaires à la culture et à la politique.
En 1978, une municipalité de gauche a majorité communiste transforme la salle de cinéma abandonnée en locaux d’activité. Ces salles seront occupées entre autres par un très important club 3ème age animé par Margueritte Cartal, une commerçante de la rue de l’Eternité très charismatique. Le sport a résisté et un important club de lutte gréco romaine de haut niveau regroupe de nombreux jeunes. Le coach, un pédagogue remarquable, est un des militant sportifs bénévoles encore en activité à l’époque : Joseph Ravel.
Dans les années 80 le centre de loisirs de l’Amicale Laïque est créé. A la demande des parents d’élèves, le soutient scolaire est mis en place au cours de l’année 1987. Ces activités enfances se développent et se diversifient.
Dans les années 2000, la « politique de la ville » de l’Etat est inventée et le quartier en bénéficie : il est classé « sensible » et les associations peuvent obtenir des financements pour développer des projets. C’est un des rares quartier de centre-ville classés ainsi. Dans la plupart des cas, ce sont des quartiers périphériques qui sont retenu par les dispositifs de la politique de la ville. L’habitat est largement paupérisé, le quartier est dépeuplé.
La rénovation du quartier se met en route. L’Amicale laïque anime dans la durée un « projet éducatif d’environnement urbain et Eco citoyenneté ». Son principe consiste à considérer la rénovation comme un grand support d’éducation populaire et citoyenne, à encourager la participation. Le projet invite les enfants et les habitants à s’intéresser et à s’impliquer dans cette grande mutation de leur cadre de vie, pour en devenir le plus possible les acteurs plutôt que des spectateurs inquiets.
Ce projet a eu un impact significatif sur le quartier, de nombreux acteurs s’en sont emparés et ont développé des projets autonomes plein d’intérêt pour le quartier.
L’activité des bénévoles reste encore aujourd’hui importante et l’Amicale Laïque soutient les projets citoyens solidaires des habitants du quartier.
Ses liens avec l’école des Chappe sont étroits.
Son projet associatif, plus précis, se fixe comme règle de mettre tous les moyens de l’Amicale au service des habitants du quartier et du bien commun.